En arrivant à Port-Réal, Edna avait l'idée de contribuer au développement de l'entreprise familiale. La capitale regorgeait d'opportunités ; et, parmi elles, une particulièrement intéressante. Un de ses frères, resté sur l'Île-Aux-Ours, l'avait appelé dans la soirée de son arrivée pour lui annoncer qu'ils avaient une potentielle commande de navire. C'était une aubaine ; vu le prix d'un navire, la vente de l'un ou même de plusieurs d'entre eux pouvait représenter un gain conséquent. D'autant plus que, toujours d'après son frère, la Dame Tyrell était en ville ; elle allait peut-être avoir l'occasion de négocier directement.
Edna n'utilisait pas d'intermédiaire, et avait appelé en personne le numéro qu'elle avait glané à son frère. Elle était tombé sur un de ses conseillers, qui accepta le rendez-vous au plus tôt. La date était proche ; le 30 ; mais ne l'arrangeait pas vraiment. Qu'importait ; son devoir passait avant tout.
Le jour venu, elle était donc là, à attendre, dans ce bar chic qu'avait proposé le conseiller. Dehors, le soleil brillait en ce milieu d'après midi et la terrasse était bondée. Mais il faisait trop chaud pour la femme du Nord qui préférait profiter de la climatisation à l'intérieur. Edna était venue quinze minutes avant le rendez-vous, parce qu'elle mettait un point d'honneur à être ponctuelle. Pour l'occasion, elle s'était bien habillée ; les gens du Bief étaient d'après ce qu'on lui avait dis très à cheval sur le style. Sans faire d'excès, cependant ; elle était très loin d'être extravagante. Un verre de vin dornien était posé devant elle, lui évoquant des souvenirs de la veille ; mais elle n'y avait pas touché pour le moment.
Et elle ne faisait absolument rien ; elle n'avait pas sorti son téléphone, elle ne lisait pas un journal, non. Elle attendait et réfléchissait sur l'offre qu'elle allait faire à sa potentielle acheteuse. Celle-ci fini par entrer dans la salle ; enfin, si c'était bien elle. Elle n'avait jamais vu la gouvernante du Bief en vrai ; juste des photos, la veille, pour savoir à qui elle allait avoir à faire. Il y avait peu de chance qu'elle se trompe ; mais dans le doute, elle attendit que celle-ci s'approche pour se lever. Elle arqua un sourcil en réalisant qu'elle était accompagnée, pour ensuite tendre sa main une fois que son interlocutrice était assez proche pour se présenter. Elle lui annonça alors très simplement pour se présenter d'une voix calme, le visage impassible :
« Edna Mormont »
Pas de bonjour ; pas de formules de politesse. Elle avait la franchise du Nord, elle n'allait pas dire des formules qu'elle ne pensait pas vraiment pour coller à une étiquette ; et c'était souvent déroutant pour les Sudistes.

« Le rendez-vous est prévu pour aujourd’hui. » M’avait dit un conseiller par téléphone, ce matin même. J’étais venue à Port-Réal avec quelques-uns de mes conseillers afin de régler quelques affaires, car c’était à la capitale que se passait la majeure partie des transactions. Ce conseiller gérait la majeure partie de l’exportation dans tout Westeros et il semblait avoir saisi l’opportunité qu’Edna Mormont se trouve en ville afin de pouvoir négocier la vente ou la location de bateaux afin de pouvoir livrer tout le continent en vivre. Les terres avaient été généreuses cette année et il ne voulait pas que les récoltes pourrissent par manque de moyen de livrer les demandeurs à temps. Les récoltes et l’agriculture de manière générale étaient le nerf du Bief, c’était l’or de la région et je ne pouvais tolérer la moindre perte, car cela risquerait de se ressentir sur les bénéfices totaux et les projets à venir que j’avais prévus.

Je m’étais bien habillée pour l’occasion, une jolie robe et de chaussures à talons, d’autant plus que les négociations semblaient avoir lieu dans un bar chic de la ville. Mon conseiller m’avait donné rendez-vous là-bas afin de m’épauler dans les négociations, d’autant plus qu’il s’y connaissait certainement plus que moi, gérant les affaires depuis quelques années déjà, sous l’ordre de mon père et pourtant, il était plutôt jeune pour un conseiller, atteignant la quarantaine, bien bâti et plutôt joli garçon si on devait avoir un avis objectif.

Je quittai mes appartements pour me rendre dans le quartier où j’avais le fameux rendez-vous. Il était là et me fit signe lorsqu’il me vit. Je souris doucement en m’approchant de lui et en regardant l’enseigne derrière lui.

« C’est ici ? » Demandais-je en levant doucement les yeux et les reposant ensuite sur mon conseiller.
« En effet, c’est ici, mademoiselle Mormont doit déjà nous attendre, je pense. » Dit-il en regardant l’heure. Il ne fallait donc pas la faire attendre davantage ! J’entrai à l’intérieur, scrutant un peu l’endroit avant de remarquer la demoiselle présente. Je m’approchai et elle se présenta, sans même un bonjour, reconnaissant là toute la délicatesse Nordienne. Je fis un petit sourire.

« Enchantée. Je m’appelle Eliara Tyrell et voici mon conseiller, Olly Caswell. » Dis-je en prenant place en compagnie d’Edna. Derrière ce bout de femme se cachait une demoiselle qui semblait ne pas désirer perdre du temps avec les mondanités, elle était typiquement Nordienne. Je ne connaissais guère l’Île-aux-Ours, mais j’en avais déjà entendu parler. Après, il y avait de nombreuses rumeurs qui circulaient avec les endroits aussi reculés, mais je n’y accordais que peu d’importance.

« Comme vous semblez apprécier rentrer dans le vif du sujet, nous sommes là pour discuter de vos bateaux. On m’a toujours venté le travail des artisans Nordiens et je me voyais mal engager des négociations avec les îles de Fer alors que vous êtes en ville. Et à vrai dire, je suis certaine que les Îles de Fer n’ont pas besoin de tels contrats… » Après tout, c’était, à ma connaissance les leaders à ce niveau-là.  
 

D'abord un peu perplexe face à la Dame du Bief, Edna fut très vite rassurée grâce à sa franchise. Elle était ravie de voir que certaines personnes du Sud pouvaient également s'adapter à ses coutumes ; et ses préjugés sur cette femme s'envolèrent directement. Elle l'écouta attentivement, tentant de déterminer s'il s'agissait de simple flatteries pour l'appâter ou de dires qu'elle pensait vraiment. Dans le doute, elle opta pour la deuxième option, et répondit donc d'une voix courtoise :
« Je peux vous donner mon avis sur les Îles-de-fer ; mais il n'est pas très objectif, peu intéressant pour vous, du coup. Je pense qu'il est plus intéressant que je vous présente des faits, afin que votre choix de producteur soit plus éclairé, annonça-t-elle en plantant son regard dans le sien. Ces faits, ce sont ceux de nos différentes productions, de leur prix et de leur temps de construction »
Elle accompagna sa parole d'un geste, sortant de son sac une tablette qu'elle alluma. Elle était déjà sur le dossier qu'elle avait préparé avant la rencontre ; elle se contenta de sélectionner la première image, de poser la tablette devant son interlocutrice uniquement ; ignorant copieusement le conseiller. Elle était très professionnelle, malgré son jeune âge. Elle avait commencé les démarches très tôt, dans des conditions difficiles ; on ne la prenait pas au sérieux à cause de son âge; elle avait dû s'adapter. Mais, ayant passé beaucoup de temps "sur le terrain", elle l'avait fait assez vite et assez bien. Elle commença donc sa présentation, en la ponctuant par des gestes, désignant les différents navires sur les images quand elle en parlait :
« Le chantier naval de l'Île-Aux-Ours produit principalement des navires de pêche ; mais, comme vous pouvez le voir, nous avons également fourni au Nord plusieurs Croiseurs de classe Rhaegar ; et aux entreprises Nordiennes des cargos ; principalement des polyvalents » elle se tut quelques instants, le temps de laisser à son interlocutrice le loisir de regarder en détail les différentes photos et présentations succinctes de ses navires. Elle reprit, toujours d'un ton assez calme et courtois, en précisant :
« Avant de répondre à vos questions, je souhaite simplement vous dire qu'en choisissant d'acheter auprès de mon entreprise, vous faites un choix : celui de la résilience. Nos navires sont peut-être légèrement moins rapide que ceux des Îles-de-fer ; mais ils ont une capacité de fret plus élevée en moyenne, des coûts d'entretien réduits, et une durée de vie beaucoup plus longue. Nous visons le long terme ; ça implique peut-être un investissement initial plus important, mais généralement plus rentable »
Elle se tut, regardant son interlocutrice droit dans les yeux, attendant sa réaction et surtout ses potentielles questions, prête à y répondre avant de continuer sa présentation.